Pascal Verrot : la direction d’orchestre à la françaisePascal Verrot est régulièrement invité à diriger des formations prestigieuses sur les trois continents européen, nord-américain et asiatique. Il a été aussi le premier Français à devenir le chef d’orchestre principal d’un orchestre japonais (Shinsei Nihon Phil) et est actuellement le chef d’orchestre permanent de l’Orchestre philharmonique de Sendai qui, lors son dernier concert, le 3 mars au Sumida Triphony Hall lui a donné les moyens de mettre en valeur sa complicité avec le public japonais.Franc-Parler : Vous êtes venu au Japon la première fois pour quelle occasion ?Pascal Verrot : Je suis arrivé en 85 pour un concours international de direction d’orchestre qui s’appelle maintenant le Concours international de musique de Tokyo qui était organisé à l’époque, et est toujours supervisé, par Min-On. Et cela a été mes premiers pas au Japon et je suis revenu très régulièrement tout le temps.Franc-Parler : Quelle influence avez-vous eue de la part du chef d’orchestre Seiji Ozawa ?Pascal Verrot : Eh bien, Seiji Ozawa que j’ai pu suivre donc au Boston Symphony en étant son assistant pendant quatre ans... Quelle influence ? Je crois que pour moi, ça a été l’exemple de cette école de direction d’orchestre lancée par ce grand maître qui s’appelle Hideo Saito et qui quelque part a une résonance dans la technique française aussi. Et je me suis senti assez proche de sa façon de faire, de sa façon de diriger. Et surtout ce qui est très très impressionnant, c’est cette énorme énergie dont il fait preuve et donc qui est une véritable inspiration.Franc-Parler : Au début de votre formation de chef d’orchestre, est-ce qu’il y a eu un apprentissage spécial en France ?Pascal Verrot : Alors il y a une école française de direction d’orchestre symbolisée par le professeur que j’ai eu qui s’appelait Jean-Sébastien Béreau. En fait, oui, c’est quelque chose de bien particulier au niveau gestuel. Il y a une gestuelle très très précise, une maîtrise de l’espace et on retrouve ça beaucoup dans cette méthode de Hideo Saito. On le retrouve aussi, c’est ce que j’ai vu des vidéos de cette méthode de direction d’orchestre. Donc, il dessine quelque chose de très très précis dans l’espace. Aussi je me suis plu à rappeler à notre auditoire du concert qu’on avait des cours d’escrime au Conservatoire de Paris. Donc, ça faisait partie de ce même souci de savoir ce qu’on faisait avec son bras et d’être à la fois précis et puis musical. Ce que m’a toujours dit Seiji Ozawa d’ailleurs : c’est qu’il fallait à la fois être précis et musical.Franc-Parler : Cours d’escrime, le métier de chef d’orchestre est exigeant au niveau physique ?Pascal Verrot : Déjà oui. Il ne faut pas être crispé. C’est à la fois très exigeant au niveau physique et à la fois, je veux dire, ça ne coûte rien. Il ne faut pas d’entraînement particulier. Je pense qu’il faut sans doute une certaine souplesse physique.Franc-Parler : En tant que chef d’orchestre français, est-ce qu’on vous demande plus particulièrement de diriger des œuvres françaises ?Pascal Verrot : Écoutez, c’est sûr que dans ma carrière de chef invité, c’est très souvent qu’on me demande de défendre la musique française. Ce que je fais très volontiers parce que je crois qu’elle est quand même un peu sous-exploitée et donc si on connaît des œuvres très importantes comme par exemple, il me vient à l’esprit, la Symphonie fantastique de Berlioz, la Symphonie en ut majeur de Bizet, le Boléro de Ravel, il y a quand même beaucoup d’autres œuvres qui sont beaucoup moins jouées. Tout un répertoire de la fin du dix-neuvième-début vingtième comme par exemple Roussel, je ne vais pas faire une longue liste de compositeurs, comme Duparc, comme Ropartz, Chausson et autres. C’est vrai qu’il y a vraiment de quoi faire pour défendre cette musique. On me demande d’en faire, donc j’en fais bien volontiers.Franc-Parler : Lorsque vous avez pris en main l’Orchestre philharmonique de Sendai, quel était votre état d’esprit et par quoi avez-vous commencé ?Pascal Verrot : J’étais très heureux de prendre le Philharmonique de Sendai parce que j’étais venu à deux reprises et j’avais pu faire de la musique française notamment la Symphonie de Chausson qui est réputée pour être difficile et qui avait très très bien marché. C’était un vrai travail approfondi dans les répétitions. Donc, je suis un peu pour l’instant dans cette veine-là mais je pense que petit à petit, on va élargir le répertoire. J’ai comme priorité de libérer un peu tous les talents, enfin de continuer à libérer les talents en fait. C’est-à-dire que chaque musicien s’exprime et que le cadre que j’impose ne soit pas un cadre rigoureux mais soit un cadre qui autorise les choses.Franc-Parler : Vous-même, vous êtes musicien de formation, ça vous influence dans votre façon de diriger ?Pascal Verrot : J’ai commencé le piano très jeune et puis après j’ai été hautboïste. J’ai fait ça au Conservatoire de Lyon. Et sans doute j’ai une relative complicité avec les instruments à vent dont je me sens finalement assez proche pour avoir fait moi-même un bout de ce parcours, un bout de cette route.Franc-Parler : Quels sont vos projets avec l’Orchestre philharmonique de Sendai pour cette année à venir ?Pascal Verrot : J’ai trois ou quatre projets principalement de musique française, je ne vais pas faire tout le détail mais notamment au mois d’avril, dans peu de temps donc le concert de début de saison 2007-2008 pour les Japonais. Il y aura du Chabrier, le Boléro de Ravel et je pense que l’orchestre de Sendai a été frustré de ne pas jouer assez ce répertoire de musique française. Donc, dans un premier temps, on va essayer de, comment dirais-je, non pas d’épuiser, ce répertoire-là, ces œuvres un peu essentielles mais on va essayer quand même de plus tirer ce côté-là.Avril 2007Propos recueillis : Éric Priou
Le chef d’orchestre Pascal Verrot
Article mis en ligne le 1er avril 2007
dernière modification le 25 mai 2023