フラン•パルレ Franc-Parler
La francophonie au Japon

Rédaction du journal:
Rédacteur en chef: Éric Priou
Rédaction: Karen, Mika Tanaka

La francophonie au Japon
Franc-Parlerフランス語圏情報ウェブマガジン フラン・パルレ
〒169−0075新宿区高田馬場1−31−8−428
1-31-8-428 Takadanobaba, Shinjuku-ku, 169-0075 Tokyo

Tel: 03-5272-3440
E-mail:contact@franc-parler.jp
http://franc-parler.jp

Le claveciniste et organiste Benjamin Alard
投稿日 2007年11月1日
最後に更新されたのは 2023年5月25日
Benjamin Alard: deux claviers pour une passion
 
Après le premier prix au concours international de clavecin de Bruges en 2004, le jeune musicien normand Benjamin Alard (22 ans), titulaire de l’orgue de l’église de Saint-Louis-en-l’Île, à Paris, vient de remporter le concours international Gottfried-Silbermann sur l’orgue historique de Freiberg, en Saxe. Deux tremplins prestigieux qui comptent mais ne l’empêchent pas de rester près du public. Il viendra au Japon, accompagner La Petite Bande dans sa tournée en mai 2008.
 
©agenceromainromain.com

Franc-Parler: Vous avez commencé par le piano. Pourquoi avez-vous bifurqué vers le clavecin et l’orgue?
Benjamin Alard: Au départ, c’était vers l’orgue en fait. À cause de l’orgue du village de là où je suis né. Puis ensuite, j’ai étudié l’orgue dans une école de musique à Dieppe et là, il y a un instrument du 18e siècle, de 1736, un instrument classique français et je pense que grâce à cet orgue…Cet orgue m’a vraiment fait aimer le répertoire, tout le répertoire français de musique ancienne. Et c’est ça aussi qui m’a fait bifurquer sur le clavecin.
 
Franc-Parler: Le clavecin et l’orgue ne sont-ils pas des instruments antinomiques?
Benjamin Alard: Pour moi non parce que c’est presque la même musique. En tout cas, au 17e et 18e siècles. Après, on a la même chose avec le piano: l’orgue ressemble de plus en plus au piano au 19e siècle. Et je pense que c’est vraiment au 20e siècle qu’il y a une rupture. Et l’orgue devient vraiment un instrument joué par une personne qui s’appelle organiste. Mais avant, je pense que l’organiste à part entière, sauf dans certaines campagnes n’existait pas vraiment: c’est des musiciens claviéristes qui jouaient de l’orgue. Mais la musique est quasiment la même à part qu’on peut jouer un peu plus lent et le langage est un peu plus adapté à l’église, si l’on veut. Plus sérieux, on va dire.
 
©agenceromainromain.com

Franc-Parler: Vous avez une prédilection pour quels compositeurs?
Benjamin Alard: Oui, il y en a plusieurs. Je pourrais vous dire Bach mais ça c’est un peu la prédilection de tout le monde. Bach, puis surtout les compositeurs qui ont, ça fait beaucoup de compositeurs, qui ont influencé l’écriture de Bach. Comme ce que j’ai essayé de montrer dans mon premier disque avec l’Andreas Bach Buch. C’est-à-dire des œuvres nordiques comme Reinecke, Buxtehude ou même françaises et italiennes qui ont influencé Bach. Et Bach a réussi à faire une synthèse de tout ça. Parce que le génie de Bach ne vient pas seulement d’un génie personnel, mais de tout ce qu’il a pu entendre avant, qui se retrouve chez lui. Je dirais Bach pour l’instant en tout cas. Mais c’est vrai, j’aime beaucoup la musique française: Louis Couperin, Rameau, François Couperin. En général, je dirais que c’est plutôt les 17e et 18e siècles qui me passionnent.
 
Franc-Parler: Quand vous interprétez un morceau, vous cherchez à retrouver l’esprit de l’époque?
Benjamin Alard: Alors, pour reprendre quelque chose que dit Gustav Leonhardt, je pense qu’il ne faut pas vraiment interpréter mais il faut replacer les œuvres dans leur contexte et essayer de se rapprocher avec les instruments. On a des écrits…Oui, personnellement, je réponds oui à votre question. J’essaie de m’approcher le plus possible de ce que pouvait être la musique à l’époque. En tout cas de jouer, sur des instruments historiques le plus souvent possible et de comparer les œuvres entre elles. Et d’essayer de faire une synthèse comme ça. Mais de toutes façons, c’est toujours un compromis puisqu’on ne saura jamais comment on jouait à l’époque. Mais je pense qu’il faut savoir faire des compromis et toujours composer avec ce qu’on a sur le moment, dans tel contexte. On ne joue pas pareil si on joue pour des gens dans une grande ville qui ont une certaine culture ou…Enfin, c’est différent. Je pense qu’il faut essayer de faire partager, de faire aimer en fait ce répertoire, en essayant de le faire comprendre le plus simplement possible.
 
Franc-Parler: Le choix de l’instrument est-il primordial?
Benjamin Alard: Ah oui! C’est très important. Le clavecin, c’est quand même un instrument qui est assez rudimentaire, c’est toujours une corde pincée. Ça a toujours à peu près le même son, si vous voulez. J’exagère un peu, ce n’est pas vrai. Mais dans l’absolu, ce n’est pas comme un orgue qui peut être vraiment différent. Le son est vraiment primordial. Donc, l’esthétique des instruments pour l’orgue en tout cas, c’est vraiment très important. De respecter ce qu’a pu connaître Bach. Aussi au niveau des mélanges des jeux, il faut complètement servir la musique. C’est important d’avoir des styles de clavecins différents et de savoir ce qu’on joue sur quoi. Mais, je reprends Gustav Leonhardt: «Un orgue n’a pas besoin d’un très bon organiste pour très bien sonner.» Puisque quand un orgue est magnifique, il suffit d’appuyer sur les touches et ça marche. Tandis que le clavecin, il faut vraiment faire le son et c’est pour ça que c’est assez différent.
 
©agenceromainromain.com

Franc-Parler: Vous jouez uniquement de la musique ancienne?
Benjamin Alard: Pour l’instant, je me limite à ça parce que je trouve que c’est beaucoup de travail et puis je ne connais pas un dixième du répertoire, j’ai encore beaucoup de travail. Je fais quelquefois quelques exceptions, on me propose des fois de jouer des choses plus tardives. J’ai joué quelquefois de la musique contemporaine mais pas beaucoup. Pour l’instant, ce n’est pas que je n’en ai pas envie, mais je préfère me contenter de faire de la musique ancienne.
 
Franc-Parler: Vous venez de remporter le prix d’orgue de Freiberg. Pensez-vous continuer sur cette lancée?
Benjamin Alard: Je ne pense pas que je vais continuer les concours parce qu’en fait, je n’ai pas du tout envie de collectionner des concours ou même d’en faire cinquante. Pour moi, c’était important de faire ce concours d’orgue qui est le 2e concours que j’ai présenté. C’est un concours qui se déroulait sur des instruments merveilleux en Saxe, des instruments en partie que Bach a connus et rien que pour la culture et pour la connaissance des instruments, j’avais envie de faire ce concours. Je m’étais dit, si je ne vais pas plus loin que la 1ère épreuve ou même la 2e, ça ne serait pas grave puisque j’aurais au moins entendu ces instruments, des instruments Silbermann qui sont vraiment dans leur jus. Mais bon, ça s’est très bien passé, j’ai eu le premier prix et je pense que ça me donne un accès à un milieu, à beaucoup d’instruments pour d’éventuels projets de concert. En fait, il y a relativement peu de concours, à mon goût, qui sont des concours qui donnent accès à des projets personnels comme ça. Souvent les gens collectionnent les prix, ils ont 5 ou 10 premiers prix et en fait, ce ne sont que des prix. Je trouve que dans le travail… un prix, bon voilà, c’est important d’avoir un prix, c’est une reconnaissance mais quand on en a 10, ça ne vaut plus rien. Je suis très heureux d’avoir fait Bruges parce que ça m’a donné beaucoup de concerts. Ça a été l’occasion de beaucoup de rencontres avec des gens qui ensuite m’ont fait confiance pour le clavecin et du coup pendant deux ans, j’avais un petit peu perdu l’orgue, j’étais sous le régime du clavecin. C’est pour ça que j’ai fait ce concours et du coup, maintenant, je suis très heureux. J’ai les deux pôles et c’est vraiment ce que je veux faire. Et j’espère toujours réussir à mener les deux: l’orgue et le clavecin.
 
Novembre 2007
Propos recueillis: Éric Priou
qrcode:http://franc-parler.jp/spip.php?article651