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Nathalie Baye, actrice du film Vénus beauté (Institut)
投稿日 1999年11月1日
最後に更新されたのは 2023年5月25日
Nathalie Baye, actrice du film Vénus beauté (Institut)
 
Avec Vénus beauté (Institut) et après plus de trente films à son actif, Nathalie Baye confirme la place particulière qu’elle occupe dans le cœur du public français. Son secret, celui d’une actrice sans fard, proche qui a su prouver que «le cinéma n’était pas réservé aux femmes magnifiques qui font rêver.»
 
© Franc-Parler

Franc-Parler: Pouvez-vous nous parler de votre carrière?
Nathalie Baye: Je viens de la danse. J’ai fait beaucoup de danse classique d’une manière professionnelle et je suis partie ensuite aux États-Unis où j’ai fait également de la danse. Quand je suis revenue en France, je me suis aperçue qu’il n’y avait pas beaucoup de travail pour les danseurs. Peut-être que je n’avais pas le feu sacré comme on dit. Ensuite, je suis entrée dans une école d’art dramatique puis au Conservatoire national d’art dramatique et j’ai eu la chance de travailler tout de suite, de faire d’abord du théâtre. Ma première pièce, c’était avec Gérard Depardieu qui n’était pas encore connu et puis j’ai été engagée par François Truffaut pour La nuit américaine. Donc, quand on a la chance de commencer avec des metteurs en scène de la qualité de Truffaut, on ne peut que tomber amoureuse du cinéma, parce que moi je me destinais à ne faire que du théâtre, que je n’ai d’ailleurs jamais abandonné, je ne pensais pas vraiment au cinéma à l’époque.
 
Franc-Parler: Que vous apporte le théâtre par rapport au cinéma?
Nathalie Baye: Ce n’est pas comparable. Ce sont deux méthodes de travail différentes. J’aime jouer sur une scène et ce que j’aime dans le théâtre, ce sont les notions de répétition, le temps qu’on a pour construire un personnage, le rapport avec le public. Ce qu’il y a de contraignant, c’est que ça dure très longtemps, on peut être pris pendant une année à jouer tous les soirs. Donc, il faut garder le désir. Mais quand ça se passe bien, il y a quelque chose de magique entre le public et les acteurs. Et ce que j’aime dans le cinéma, c’est qu’il y a un jeu différent, la caméra qui vient vous voler des choses, ce côté immédiat. Ce sont deux formes de travail différentes que j’aime autant l’une que l’autre, mais je ne concevrais pas ce métier si je ne faisais que du théâtre ou que du cinéma.
 
Franc-Parler: Qu’est-ce qui vous pousse à choisir un rôle?
Nathalie Baye: Je n’ai pas de critères si ce n’est que le rôle soit bien écrit, que ce soit un rôle qui soit bien construit, et puis ensuite, ça fonctionne sur des désirs. On a envie de faire vivre ce personnage, mais quand j’accepte un film, ce n’est pas uniquement pour un rôle. Parfois j’ai refusé des rôles magnifiques parce que le scénario ou le metteur en scène, son travail ne m’attiraient pas suffisament pour m’embarquer sur le bateau.
 
Franc-Parler: Y a-t-il un type de rôle ou de cinéma que vous préférez?
Nathalie Baye: Non, j’aime la diversité, j’aime tous les cinémas, les comédies, les films qui sont par moments plus sérieux, les films populaires. Ça peut se voir dans ma filmographie: j’ai fait des films avec Godard et puis après j’ai fait des films plus ludiques. Moi, ce qui m’intéresse dans ce métier, ce sont les rencontres, avec un rôle, avec un auteur, avec un metteur en scène, avec des acteurs et puis le fait que ça colporte des idées qui me séduisent.
 
Franc-Parler: Avez-vous songé un jour à arrêter?
Nathalie Baye: Ce serait horrible d’arrêter. Non, je n’ai pas envie d’arrêter. Je ne sais pas, je ne sais pas ce que sera demain, je ne suis pas quelqu’un qui planifie du tout. J’ai horreur de ça, je n’aime même pas trop savoir. La chose la plus difficile dans ce métier, c’est justement qu’on ne sait pas, on ne sait pas de quoi est fait demain. Il y a dans une carrière, même les plus grandes, des hauts et des bas, des doutes, des surprises, des déceptions et j’aime bien ça. C’est c’est ce qu’il y a de plus difficile, mais j’en ai fait ma chose, je me suis approprié cette espèce de doute.
 
Franc-Parler: Comment classifiez-vous Vénus Beauté?
Nathalie Baye: C’est quelque chose de très français, je ne sais pas si c’est uniquement français, c’est qu’on veut toujours rentrer les choses dans des catégories. On va dire comédie-dramatique. Je trouve que ce film est drôle par certains côtés, il est très émouvant par d’autres. Il raconte en même temps des tas de choses qui sont réelles: la solitude des gens, le refus de voir passer le temps, il peut raconter plein de choses. Il y a des films qui sont un bloc où on ne peut recevoir qu’une chose. Là, on peut le recevoir de trente-six mille manières. En tout cas, ce film a été un grand succès en France et les gens visiblement s’y sont retrouvés.
 
Franc-Parler: Le film Vénus beauté (Institut) a été écrit en grande partie pour vous…
Nathalie Baye: Oui, on avait déjà fait un film ensemble avec Tonie Marshall. Elle a eu envie de retravailler avec moi et elle m’a dit: «Je vais t’écrire un rôle», ce qui était un beau cadeau. Elle avait une idée vaguement du personnage qu’elle voulait que je joue. Puis un jour en allant dans un institut, elle a eu l’idée d’un lieu parce qu’elle s’est aperçue que c’était un endroit absolument hallucinant, qu’on n’avait pas souvent vu au cinéma. Elle a fini par écrire ce scénario que je trouve formidable parce qu’il y a les ingrédients que j’aime dans le cinéma. C’est-à-dire un mélange d´émotion et de rire. On passe d’un état à l’autre, ça me plaît beaucoup. Et puis les personnages pleins de paradoxes comme ça, elle est elle et son contraire, j’aime beaucoup.
 
Franc-Parler: Pour jouer ce rôle êtes-vous allée plusieurs fois dans un salon d’esthétique?
Nathalie Baye: J’étais déjà allée dans des salons d’esthétique parce que c’est très agréable de se faire cocooner, mais pour le personnage, oui. Tonie Marshall a demandé à ce que j’aille voir des esthéticiennes travailler. Elles m’ont appris des gestes professionnels pour que ce soit crédible: les massages, les manières dont on applique les masques, comment on passe certains appareils. J’ai appris à épiler les jambes, ça a été une catastrophe. Il y avait une pauvre assistante qui m’a donné ses jambes et je lui ai fichu son système pileux à l’envers car on doit mettre la cire d’un côté, on doit l’enlever de l’autre. Mais enfin, très consciencieusement, j’y suis allée plusieurs fois. Je n’ai pas essayé d’apprendre le métier d’esthéticienne, mais j’ai observé les esthéticiennes surtout pour crédibiliser la gestuelle d’Angèle.
 
Franc-Parler: Les instituts de beauté sont-ils efficaces?
Nathalie Baye: La vie est faite de petites choses qui font du mal et de petites choses qui font du bien. Et quand il y a une petite chose qui fait du bien, c’est à prendre. Quand une femme qui se sent assez seule va dans un institut de beauté, ce n’est pas uniquement pour avoir une peau lisse, c’est aussi pour parler car elle n’a personne à qui parler. Ce sont de petits moments qui sont parfois aussi importants que certains grands moments.
 
Franc-Parler: C’est votre troisième visite au Japon, quelles sont vos impressions?
Nathalie Baye: La première fois que je suis partie pour le Japon, je ne sais pas pourquoi, j’ai pensé que je n’allais pas aimer. Il y avait quelque chose de très moderne qui me gênait. Les Japonais sont à la pointe de certaines choses comme ces appareils [en désignant l’enregistreur de MD] qui sont magnifiques et auxquels je ne comprends rien parce qu’ils sont trop compliqués. Et je me suis dit que j’allais passer à côté de ce pays. Je n’étais pas convaincue que ce pays allait me séduire et j’ai été tout de suite éblouie par Tokyo ( je ne connais pas le reste du pays), par les paradoxes qui passent par l’énormité de cette ville. Par exemple, sa population gigantesque et en même temps, vous allez dans des carrefours où il y a dix fois plus de monde que dans un carrefour parisien et c’est dix fois moins bruyant. La deuxième fois, je faisais partie du jury du festival de Tokyo, et là aussi, j’ai trouvé qu’il y avait quelque chose de vraiment gracieux, de très émouvant dans ce pays. À chaque fois, ma séduction est encore plus grande.
 
Novembre 1999
Propos recueillis: Éric Priou
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