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Edward Achour, designer en chef chez Carven
Article mis en ligne le 1er septembre 2000
dernière modification le 25 mai 2023
La mode a trente ans
 
Depuis son ouverture en 1945 sur les Champs-Élysées, la maison de création-couture Carven dont la célèbre robe Ma Griffe fit sensation la même année n’a cessé d’habiller la femme. De la haute couture au prêt-à-porter en passant, selon les années, par les uniformes des hôtesses d’Air France et ceux des équipes olympiques françaises, elle apporte son savoir-faire et sa conception de l’élégance. Edward Achour, originaire de Nice, en est le designer en chef depuis 1998. Il a présenté à Tokyo, au cours de la soirée Paris, une rétrospective des cinquante années de créations de la maison ainsi que ses nouvelles collections.
 
© Franc-Parler

Franc-Parler : L’esprit du prêt-à-porter est différent de celui de la haute couture ?
Edward Achour : En fait, je m’inspire de la collection haute couture qui sert de vitrine dans le monde entier et qui après est rééditée en prêt-à-porter pour des matières, des découpes plus faciles à porter, et plus faciles à vendre, beaucoup moins chères parce que fabriquées industriellement. La clientèle est différente. Il y a des femmes qui complètent leur garde-robe de haute couture par des vêtements de prêt-à-porter mais la haute couture se vend pour le soir et le cocktail tandis que le prêt-à-porter se porte tous les jours.
 
Franc-Parler : Au niveau des produits avec les licenciés, avez-vous un droit de regard ?
Edward Achour : Oui justement, j’ai profité de ma visite pour regarder les collections qui étaient en cours. On choisit les tissus ensemble à Paris, quand il viennent, et je leur envoie mes dessins. On leur envoie les patrons donc il y a à adapter mais pas de travail de création chez eux. Donc moi, j’ai le suivi de ça.
 
Franc-Parler : Votre jeunesse, c’est courant dans le métier ?
Edward Achour : J’ai trente ans, je suis le plus jeune et c’est vrai que maintenant, le niveau d’âge baisse pour travailler dans la mode et moi, j’aimerais faire ce métier jusqu’à quarante ans mais pas plus tard.
 
Franc-Parler : Pourquoi jusqu’à quarante ans ?
Edward Achour : Parce je trouve qu’il faut avoir l’âge de ses clients pour les comprendre et je pense qu’une femme n’aime pas être habillée par quelqu’un de plus vieux. Et je me mets à sa place et je la comprends et les conseils de quelqu’un qui ressemble peut-être à son mari ou à son père ne l’aide pas ou l’intéressera moins que ceux de quelqu’un qui ressemble à son fils.
 
Franc-Parler : Alors comment vous recyclerez-vous ?
Edward Achour : Après, je me recyclerai dans la décoration ou bien j’aurais une maison de couture à moi, mais sans être le designer en chef.
 
Franc-Parler : Quel est votre parcours ?
Edward Achour : J’ai commencé chez Burberrys, ensuite j’ai tourné à travers le monde, j’ai été chez Ralph Lauren, Escada, Torrente et puis voilà chez Carven.
 
Franc-Parler : Pourquoi êtes-vous venu dans cette maison ?
Edward Achour : Quand je fais des dessins, j’habille des petites femmes et madame Carven est une petite femme puisqu’elle mesure 1,56 mètres. Et je voulais travailler ou pour Chanel ou pour Carven et il se trouve que j’ai rencontré madame Carven et on s’est très bien entendus. Lorsqu’elle m’a présenté à Daniel Harlant, ça s’est très bien passé.
 
Franc-Parler : Vous travaillez dans un esprit de continuité, de modernisme ?
Edward Achour : Oui, je me sers toujours de ce qu’elle a fait, je lui montre toujours mes croquis et elle l’agrée ou pas. Mais je lui montre toujours et je lui demande si elle l’aurait fait ou ce qu’elle aurait mis à la place. À la fin de la collection elle me dit : « C’est ce que j’aurais fait. » C’est ça qui fait plaisir quand même. C’est le petit plus qui est qu’on est une maison individuelle plutôt qu’un grand groupe où il n’y a plus d’âme.
 
© Franc-Parler

Franc-Parler : Que pensez-vous avoir apporté à la collection ?
Edward Achour : J’ai apporté justement la petite touche de quelqu’un de jeune et surtout un œil masculin sur la mode féminine. Et je trouve que c’est pas mal, parce qu’une femme va se limiter, vous ne verrez jamais une femme porter quelque chose toute seule. Il va falloir qu’on la pousse et je pense que c’est un bon compromis entre madame Carven et moi.
 
Franc-Parler : Qu’est ce que vous appelez l’esprit “Parisienne” ?
Edward Achour : Parisienne, c’est les tailleurs. Vous ne voyez pas une femme en tailleur ailleurs qu’à Paris. D’ailleurs ici, vous ne voyez personne en veste et le tailleur ne se porte qu’à Paris ou dans les soirées aux États-Unis, c’est pourquoi on est très forts aux États-Unis également. Et pour elles, l’esprit parisien, c’est la veste, quand elle est très bien construite, c’est très beau.
 
Franc-Parler : Avez-vous une préférence pour une matière en particulier ?
Edward Achour : Le cachemire. C’est une matière qui peut se porter l’été et l’hiver. C’est magnifique. Il n’y a rien de plus beau.
 
Franc-Parler : Comment se passe le travail au niveau de l’atelier ?
Edward Achour : Je donne en début de saison mes impressions ou mes envies et puis chacun travaille dans ce sens-là, dans une gamme de couleurs qu’on a établie ensemble et chacun travaille dans son sens avec les croquis que j’ai donnés. Donc, certaines de l’atelier me disent, c’est possible ou pas et dans ce cas-là, on évolue sur autre chose et surtout avec l’évolution des licenciés, leurs demandes et leur barême de vente.
 
Franc-Parler : Prenez-vous des stagiaires japonaises ?
Edward Achour : Oui, mais jamais plus d’une car on peut se concentrer sur elle et lui apprendre plus de choses. À chaque saison, j’ai une stagiaire différente.
 
Franc-Parler : Pour la haute-couture, suivez-vous vos clientes ?
Edward Achour : Oui, toutes mes clientes, je les vois avant, je ne m’occupe pas de l’argent, mais je les conseille.
 
Franc-Parler : Sont-elles exigeantes ?
Edward Achour : Elles sont exigeantes surtout avec moi parce qu’elles ont l’impression que comme c’est moi, je vais pouvoir faire beaucoup plus de choses que si c’était une vendeuse. Elles sont très très exigeantes, mais c’est bien.
 
Franc-Parler : Une belle robe demande combien de temps pour se réaliser ?
Edward Achour : Là justement, on a une robe de la collection qui a pris à trois personnes deux semaines de réalisation, à huit heures par jour.
 
Franc-Parler : Qu’est-ce qui sera à la mode cette saison automne-hiver ?
Edward Achour : On a joué sur deux thèmes différents, sur les écossais, donc des écossais vifs et puis les couleurs naturelles, les beiges qui sont toujours de bon goût et de bonne vente pour la maison.
 
Septembre 2000
Propos recueillis : Éric Priou
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